Il y a quelques semaines, nous avons suivi la plus célèbre course au monde : les 24 Heures du Mans. Véritable icône du patrimoine automobile, ce n’est pas seulement une épreuve d’endurance, c’est tout un écosystème qui vit au rythme de la course durant plusieurs jours. Les résultats de l’épreuve sont désormais connus, mais la vie et l’ambiance autour de la piste sont, au moins, autant passionnantes.
J’ai eu le privilège de vivre les préparatifs et les phases cachées de la course, voici Le Mans côté coulisses…
En vidéo, les coulisses des 24H du Mans :
J-2, la tension monte
C’est le jeudi précédent la course que j’ai pu accéder au circuit Sarthois. Les teams sont déjà installées, d’immenses campings sont dressés au cœur du complexe, les grands partenaires accueillent leurs hôtes dans de magnifiques structures appelées des ‘hospitality’, construites spécialement en bord de piste. C’est dans celui de Michelin que j’ai établi mon camp de base. De la terrasse, la vue est idéale ; situé au niveau du raccordement, c’est l’endroit qui marque la jonction entre le circuit permanent et celui temporaire, dédié aux 24 Heures.
Des Aston et des qualifs
Une première course se déroule en début d’après-midi, uniquement composée d’Aston-Martin, dont une sublime Vulcan. Cette « mise en bouche » permet de commencer à sentir les vibrations de la course… on y est ! À 16 heures, ce sont les qualifications qui débutent, un moment d’une importance énorme, qui déterminera l’emplacement de chaque concurrent sur la grille de départ.
Enfin la meute arrive, elle est composée de plusieurs catégories de voitures. La catégorie reine, la LMP1, est fièrement représentée par l’équipe Toyota, avec un certain Fernando Alonso au volant. En LMP2, beaucoup de marques françaises, Alpine, Ligier, vont tenter de se faire une place. Coté LM-GTE, ce sont des voitures qui ressemblent déjà plus à ce que nous connaissons, Porsche 911 RSR, Ferrari 488, Ford GT ou encore Corvettes vont assurer le spectacle. Cette séance permet déjà de sentir ceux qui vont aborder la course le couteau entre les dents et on remarque que côté Porsche et Ford, ils ne sont pas là pour faire de la figuration, le duel va être bon !
Un Vendredi au Mans
Le vendredi le circuit est au repos, rien sur la piste. C’est dans le centre-ville que l’agitation s’installe. En effet, l’après-midi marque la présentation des écuries et des pilotes à la population. Véritable institution, cette parade réunit des dizaines de milliers de personnes le long d’un circuit (lent !) aménagé dans les rues. A bord de super-cars et autres vieilles mécaniques, on peut voir de près la tête de ceux qui nous feront vibrer le lendemain sur le circuit. La fête est populaire et bon-enfant, comme une caravane du tour de France.
Funky circuit la nuit
Le soir, dans l’enceinte du circuit, un concert de Jamiroquai est offert aux spectateurs, l’occasion d’écouter les tubes déjà connus et de se trémousser avec la horde d’Anglais déjà bien arrosés ! Cette « mise en ambiance » ne fait que rajouter au côté populaire de l’évènement. À minuit, retour à l’hôtel, la journée du samedi va marquer le début des hostilités…
Samedi, on s’approche du départ
Samedi 16 Juin 2018, 13h30, ce sont les portes de la grille de départ qui s’ouvrent à une foule de privilégiés. Marcher sur la piste est déjà un plaisir rare, mais voir les teams et les voitures alignées et accessibles c’est vraiment exceptionnel. Celles que j’ai vu tourner aux qualifs sont là, endormies mais prêtes à bondir. Les pilotes posent pour les badauds, mais on sent la concentration s’installer.
On croise des personnalités, animateurs de télé, d’anciens vainqueurs de l’épreuve, mais tout ce petit monde forme une fourmilière unie par la même passion, celle de cette course mythique. Dans les tribunes la ferveur monte, encore une fois les Anglais donnent de la voix, bientôt aidés par des Suédois, mais où sont les Français ? Certainement occupés par la Coupe du Monde de football…
15 heures, les héros sont en piste, la bataille sera longue
Retour à l’hospitality Michelin pour le départ qui, depuis 1968, est dit « lancé ». Les voitures partent dans l’ordre des qualifications pour un tour de chauffe derrière le pace-car (Porsche pilotée par Jacky Ickx…). Puis, quand le pace-car s’en va, c’est le départ, à 15 heures précises.
Dès le premier tour, l’ordre est établi : les deux Toyota prennent la tête pour ne plus la quitter, derrière, les deux Porsche 911 RSR ne se lâcheront quasiment plus. Au bout d’une heure, les LMP1 ont déjà plusieurs tours d’avance, impressionnant ! Le programme en coulisse est chargé, c’est le moment d’aller vivre un moment suspendu dans le temps, direction les paddocks.
Michelin et Ford Performance, partenaires de nos rêves
C’est à l’invitation du team Ford Performance que j’ai pu rejoindre le stand de la GT. En pleine course c’est un privilège rarissime d’être là au milieu des techniciens et des pilotes. On nous explique les différentes parties, la salle de chauffe des pneus, l’atelier de fabrication d’éléments carbone, la partie des ingénieurs de course… Je savoure l’instant quand tout à coup le responsable nous indique qu’une voiture arrive pour un pit-stop…
Vivre un changement de pneus, un refuel et un changement de pilote est un moment suspendu dans le temps. Même si cela ne dure que quelques dizaines de secondes, j’ai tellement inscrit ce moment dans ma mémoire, que pour moi, il a duré des heures ! C’est vraiment le moment que je retiendrai de la course : ces quelques secondes de privilège, point culminant de la passion et de l’immersion.
La course tourne et le circuit vit
Qu’il est grand ce circuit du Mans ! Imaginez qu’il fait environ 14 kilomètres, et au milieu, c’est une ville qui s’est installée. Ou plutôt un village de tentes… je décide d’aller m’y promener.
Surprise, ce n’est pas le camping des Flots Bleus, c’est même l’endroit le plus fou du circuit ! Des dizaines de supercars sont là et, juste à côté, des tentes sont plantées. Une Audi R8 V10 orange est dans l’herbe avec la tente assortie à la voiture. Ce garage à ciel ouvert est dingue : Ferrari, Lamborghini, Aston et Porsche de tous les âges sont là. Encore une fois, la plupart des plaques sont anglaises, et le village s’est organisé, avec ses propres points de restauration. Certains regardent même la course installés devant des écrans géants, sous la tente !
Il est temps de prendre de la hauteur
Au soleil couchant, c’est pour nous le moment de rejoindre notre ‘taxi’ volant, avec un survol de la course en hélicoptère qui nous est offert. Juste derrière la ligne droite des stands se situe un aéroport, ou dorment tranquillement quelques jets privés, et où des hélicoptères proposent de faire le tour de la boucle du circuit.
Hormis le vol en lui-même, c’est absolument magique de voir le tracé du circuit en réel. Les voitures sont bien visibles et c’est impressionnant d’observer les trajectoires et les vitesses atteintes. Encore un moment de privilège rare, une vision féerique qui nous a été offerte.
Des rencontres moteurs de passions
Le Mans est aussi un endroit de convivialité et de rencontres… C’est en descendant de l’hélicoptère que nous décidons d’aller faire un petit tour avec le jouet de Victor, et grâce à Christophe (le Papa de Victor, ça va vous suivez ?), nous trouvons même un taxi pour y aller. Le trajet sera l’occasion de débattre de notre sujet favori : les voitures, pardi ! Nous voilà à destination, le centre Ferrari Pozzi du Mans, resté ouvert 24/24 pour l’occasion et surtout pour accueillir ses clients. Vous l’aurez compris, c’est un petit tour en Cheval Cabré que nous allons faire.
L’une des plus belles GT du moment m’attend, la sublime F12, avec son V12 avant, c’est pour moi l’une des voitures sportives ultimes du moment. Nous partons faire un tour aux abords du circuit, et là encore l’ambiance est dingue, des pouces levés, des yeux écarquillés, des remarques sympathiques, pour une fois rouler en Ferrari n’attire que sympathie et bonne humeur. Après cet ultime moment de plaisir, il est temps de rentrer se reposer, dans 5 heures il faudra se lever pour affronter la dernière journée…
Dimanche, dernière ligne droite : de la fatigue et du bonheur
Déjà trois jours au Mans, seulement trois jours au Mans. Comme une colonie de vacances, c’est passé très vite, trop vite et déjà la fin approche. Loin d’être morose, cette journée promet encore quelques surprises. Notre hôte, Michelin, nous convie à ce qu’on appelle le WorkShop : endroit caché du public où sont stockés et montés les pneus des 45 voitures partenaires du manufacturier français.
Cette structure est incroyable, plus de 8500 pneus sont entreposés ici, chacun étant sérialisé et tracé, tant il renferme de secret de fabrication. Des lignes de montages et d’équilibrages tournent pendant 24 heures afin de proposer aux teams des chariots de roues prêts à être utilisés. Un véritable centre technique pneumatique dédié à la course. Déjà la fin de course approche, il est temps de rejoindre la loge Michelin.
Fin de course sans surprise mais l’essentiel est ailleurs
De la fenêtre de la loge, j’assiste à l’arrivée de la course. Sans grande surprise, les deux Toyota s’imposent, la tension de la course laisse place à l’euphorie de l’arrivée.
Tour d’honneur des pilotes, clameur de la foule, c’est l’apothéose de ces 24 heures. Malgré cela, ce n’est bizarrement pas ce que je retiendrai de ces quatre jours. Venir au 24 heures du Mans ce n’est pas juste regarder des voitures passer pendant de longues heures. C’est surtout profiter des lieux, de l’ambiance, de l’animation et des foules de passionnés.
Comme me le disait un pilote : une fois la course lancée, on ne voit plus le public ni les alentours, et je me dis finalement que la meilleure place n’est pas sur la piste au volant. La meilleure façon de vivre cet évènement, c’est de déambuler sur le vaste site, au rythme des concerts, des rencontres et des voitures. Ce savoureux mélange qui constitue la magie de cette course. Jamais ailleurs je n’ai vécu cela, il n’y a aucun doute, les 24 Heures du mans, c’est magique !